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le blog de Laurent Tellier

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Evasion, poésie, loufoque, tout ici est permis dans le respect des autres et de soi-même . Un espace de liberté et de partages autour d'un thème commun: l'amour de la langue française.


Moustiers, lieu de réflexion

Publié le 20 Octobre 2023, 09:58am

Parmi mes nombreuses névroses obsessionnelles, il y a la philatélie, et donc, de fait, je suis immédiatement classé parmi les dinosaures ringards et démodés (remarquez la subtile différence entre les deux). Le timbre disparaît, comme tous les objets qui accompagnaient la correspondance écrite. D’un autre côté, ce qui est rare est cher et ça devient intéressant. Pourquoi je vous raconte ça, à cause de Moustiers Sainte Marie et son étoile suspendue (au sens propre) entre les deux rochers qui la dominent. C’est en 1964 que Jean Pheulpin dessine et grave le timbre de ce village magnifique dans une série de 7 sites, dont j’avais eu plus tard, l’idée saugrenue de tous les visiter. Comme quoi, le timbre avait du sens.

Et voilà donc que je viens de réaliser la dernière étape du voyage que j’avais acheté alors pour 5 francs et 5  centimes, mais tout cela n’a aucun intérêt.

Moustiers Sainte Marie, c’est un peu l’endroit pour reprendre son souffle, qui vient d’être coupé par la visite des gorges du Verdon (timbre de 1978, c’est juste pour vous embêter). Et quel étonnement. Voilà encore un de ces lieux qui semble sorti du travail d’un sculpteur de merveilles, un lieu qu’il suffit d’approcher pour en sentir l’envoûtement et même si la légende a été réécrite par Mistral, et peu importe le sens que chacun peut lui donner, regarder l’étoile quand le ciel est d’un bleu pur, ce fut pour moi l’occasion de repenser à cette inaccessible étoile de Brel …

C’est là que nous avons cassé la croûte, sous un arbre majestueux, en essayant de trouver des mots à ce que nous avions vu. Moi, j’étais hors-jeu, pour avoir pulvérisé les qualificatifs de la médiocrité : c’est beau, c’est grandiose, c’est magnifique, et puis j’ai entendu : mais enfin, comme ce n’est pas l’œuvre des hommes, il suffit de dire que c’est simplement l’œuvre de la Nature. Elle n’a pas besoin de qualificatif, quel besoin de tout renvoyer à des sentiments humains, comme si nous étions tout et à l’origine de tout, et même désormais la cause de la fin de tout. C’est le travail des temps que nous ne connaissons même pas. Et bien, ça m’a cloué le bec, parce que c’était d’une grande justesse. Tout ce que j’ai vu ne nous appartient pas et les mots pour qualifier tout cela ne sont pas ceux de nos impressions, de nos convictions, de nos représentations. Moi, je suis passé tel jour là-bas, comme tous les passagers venus depuis la nuit des temps et comme ceux qui suivront. Les premiers se sont étonnés, les suivants feront de même pour contempler un chef-d’œuvre dont nous ne sommes même pas les inventeurs. C’est à mon avis, la meilleure façon de penser à ce que nous sommes devant le temps immobile, nous qui courons tellement vers l’inutile.

Je me suis surpris moi-même en écrivant ce texte, c’est que j’ai été vraiment saisi devant tant de grandeur.

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