Jean Ferrat
Pourtant, que la montagne est triste depuis ce jour
Quand les hirondelles vous ont quitté pour toujours
Leur automne les appelant aux pays du soleil
Ce jour-là vous partiez et rien n’est plus pareil.
Il y avait devant vous vos amis de l’Ardèche
Cette terre aux cœurs gros et à l’herbe si sèche
Ce n’était pas la nuit, il y avait du brouillard
Dans les âmes émues, des larmes dans le regard.
Compagnons des combats pour cette liberté
Que vous-même chantiez et même chérissiez
Vos amis les poètes, vos chers compagnons
Ayant nom de Rimbaud et même d'Aragon
Le poète a toujours raison
Qui voit plus loin que l’horizon
Ce poète au beau nom d'un morceau de l'Espagne
Abîmée par les bombes lâchées par des vautours
Ronronnant dans le ciel, détruisant les campagnes
Préparant l'holocauste qui viendrait à son tour.
J'aime entendre vos mots, ceux d'un homme écorché
Qui chante avec son cœur, lui aussi ébréché
Les airs d'un idéal, que l'on pense bien daté
Il s'agit simplement, de la fraternité.
Je me sens proche vous, j'ai l'âme d'un ouvrier
Qui s'échine avec peine pour dire qui vous étiez
Ces oubliés du monde vous les avez aimés
Les combats pour l'honneur appartiennent aux forçats
À tous ceux qu'on envoie pour mener des combats
Qui ne sont pas les leurs mais que l'on a armés
Pour défendre une cause qu'ils ne comprennent pas
J’aime votre idéal, cher ami Jean Ferrat
Aujourd'hui vos idées sont rangées au placard
Notre monde est banal, les rêveurs sont ringards
Vos amis et vos proches étaient des camarades
Vous partagiez ensemble leurs luttes de votre estrade
Je vous hisse au sommet de tous mes panthéons
Je ne vends pas mon âme aux séides de Mammon
C'est vrai, vous le chantiez, que la montagne est belle
La chanter avec vous c'est un rêve éternel.